Hugographies Rêveries de Victor Hugo sur les lettres de l’alphabet (Hermann 2022), co-authored with Pierre Georgel, studies the relationship between texts and drawings in Hugo’s work through the letters of the alphabet. We argue that although drawings and writings differ as media, they concoct the same mental images, ideas, affects, and pursue the same expressive aims. By illustrating how Hugo’s oeuvre is constructed visually, acoustically and alphabetically, this book allows for an enriched and interdisciplinary analysis of Hugo’s texts and drawings as a whole. In dealing with analysis of mixed text and drawings, this is the first book in Hugolian studies that demonstrates not only how the author-artist’s writings and drawings are connected, but how that connection is essential to capturing the significance of the alphabet in Hugo’s view of the world and creative process.
L’esprit de l’homme a trois clefs qui ouvrent tout : le chiffre, la lettre, la note. Savoir, penser, rêver. Tout est là. (Victor Hugo, Les Rayons et les ombres, Préface) Dans cet énoncé de la préface des Rayons et les ombres, qui vaut pour la totalité de l’œuvre, la « lettre », bien sûr, à côté du « chiffre » (les opérations abstraites des mathématiques) et de la « note » de musique (la rêverie, « pensée à l’état de nébuleuse»), désigne par synecdoque la pensée discursive – articulée, organisée, logique. Trois « clés », trois voies d’accès, distinctes mais complémentaires et souvent associées, au « tout » dont le poète se donne pour mission de rendre compte : la réalité dans toutes ses dimensions, y compris ce qui « se dérobe à l’observation» : «au-delà du visible l’invisible, au-delà de l’invisible l’inconnu».
Unité minimale du langage et de l’écriture, la lettre alphabétique est un constant objet de réflexion, de spéculation, voire de divagations de la part de Victor Hugo, que celui-ci la considère isolément, dans sa configuration propre – visuelle ou sonore –, ou au sein des mots et des constructions où elle intervient. De là un complexe d’idées et de représentations qu’on s’attache ici à cerner sous forme d’abécédaire – un abécédaire savamment désordonné, qui suit les libres associations, les détours, les zigzags de la pensée, et, de lettre en lettre, ouvre au lecteur – tantôt entrebâille, tantôt ouvre toutes grandes – les portes du paysage mental hugolien.
Ajoutons que le dessinateur n’est pas moins mis à contribution que l’écrivain. Fruits d’une seule et même imagination, dessins et écrits diffèrent par leurs moyens mais brassent le même fonds d’images mentales, d’idées, d’affects, et obéissent aux mêmes visées expressives. L’œuvre de Victor Hugo est un bloc.